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En Camargue on avait l’habitude de voir les photos de Lucien Clergue, ses toreros plein de fierté de défis et de défiance, de hargne, parfois, de victoire et de fierté, tellement.
Le grand photographe qu’il était devenu avait connu l’arène dès l’enfance, il en avait gardé d’admiration, rendait hommage aux héros qui peuplaient ses souvenirs, aux toros qui se battaient, vaillants et dignes.
Il faudra désormais compter avec le regard de Philippe Reynaud.
Lui a rencontré ce monde à mi-vie, après une carrière remarquable et remarquée dans l’univers de la mode, comme mannequin, puis comme photographe. Il n’a lui pas sa mémoire d’enfant, mais son goût pour l’esthétique du geste, l’élégance d’un mouvement qu’il révèle en puissance, la grâce d’une démarche qu’il sait sublimer, des parures et des dorures dont il sait rendre l’éclat, la noblesse, le prestige.
Il est entré dans ce monde à pas feutrés, un pas d’écart dans sa carrière, une envie d’autres mondes, une quête d’autres regards, d’une autre beauté, d’autres hérauts, peut-être.
Lui qui a l’art des contrastes n’a rien à envier à un Lucien Clergue : le ciel de la Camargue est franc, celui de la tauromachie, qu’on l’aime ou non, aussi.
On y retrouve des hommes seuls, dans leurs combats et leurs peurs, mais aussi des traditions, un univers, fermé / ouvert, comme un obturateur qui voudrait dire : à chaque combat il s’agit de pouvoir rééditer demain le clac de fin.
De sa formation de photographe de mode on retrouve la maîtrise des plans et le jeu des flous, le goût des défilés et de l’instant de grâce, la fierté du port, l’arène comble, l’hymne a la précision du geste.
Qu’on apprécie aime juge ou rejette le spectacle, Philippe Reynaud sait avec brio lui aussi en rendre toute la fougue la puissance et la danse, en transmettre une passion qui vient d’ailleurs et une filiation de sang ou de terre, une tradition que l’on veut perpétuer, parce qu’elle nous tient chair, appartenance, ou lignée.
Une chose est certaine, c’est que ces photos lui ressemblent, et si on lui reconnaissait jusque-là de savoir rendre la grâce d’un pas d’un port sur un podium ou vanter la beauté d’une ligne, rapporter l’esthétique défardée d’un jeu de corps, on peut désormais dire que son regard ne tient pas aux défilés mais à la vie qui s’étreint à corps, de passion et d’âme, femmes et hommes confondus.
Ses meilleures photographies sont celles-là, triomphe personnel et élégance de la ligne, ne pas s’y tromper : il est autant au juste là qu’il l’est avec tout corps, dans un corps à corps qu’il éprouve lui, plein d’admiration, sans y être né comme Clergue, mais pour en aimer les tensions la parade et les victoires, aussi.
Elsa Olu, Saint-Didier-au-Mont-d’Or, le 4 juin 2023
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